Qui pourrait croire qu’un petit carré de chocolat, donné au chien en récompense ou pour lui faire plaisir, est en réalité un poison pour lui ?
C’est pourtant vrai : les centres anti-poison vétérinaires enregistrent des pics du nombre de cas d’intoxication au moment des fêtes de Pâques et de Noël…
D’où vient la toxicité du chocolat ?
Le chocolat est fabriqué à partir de fèves de cacao, qui contiennent, entre autres, de la théobromine, de la théophylline et de la caféine en petite quantité.
C’est la théobromine qui est responsable de la toxicité du chocolat : ce composé alcaloïde a plusieurs effets sur l’organisme :
- Elle augmente la sécrétion d’urine (propriétés diurétiques).
- Elle diminue la fréquence cardiaque à faible dose, mais l’augmente à des doses plus importantes.
- Elle stimule le système nerveux central à forte dose, provoquant agitation, irritabilité, insomnies, tremblements…
La concentration en théobromine est variable selon le type de chocolat : 150 à 220 mg pour 100 g de chocolat au lait, 450 à 650 mg pour 100 g de chocolat noir et 1300 à 2000 mg pour 100 g de chocolat amer à pâtisser. L’homme peut consommer du chocolat, même en grande quantité, en toute sécurité, mais les chiens ne possèdent pas les enzymes nécessaires à la dégradation de la théobromine. Ils la métabolisent beaucoup plus lentement (la théobromine reste trois fois plus longtemps dans l’organisme des chiens que dans celui de l’Homme), d’où le risque d’empoisonnement si de grandes quantités sont absorbées.
Le chocolat blanc et les friandises aromatisées au chocolat pour chiens ne contiennent que de très faibles quantités de théobromine, insuffisantes pour provoquer une intoxication.
Est-ce vraiment mortel ?
La dose mortelle de théobromine est généralement estimée à 200 mg par kilo de chien, soit 1400 à 1600 mg pour un chien de 7 à 8 kg. Un chien de petite taille ingérant une tablette de chocolat noir peut donc s’intoxiquer !
Il existe cependant de grande variation selon les individus et la qualité du chocolat, et la toxicité peut apparaître à de plus faibles doses. Dans le doute, mieux vaut éviter de donner du chocolat à son chien.
Certaines races de chien dites « brachycéphales », qui ont une face courte et large comme le bouledogue français, le bull-dog anglais, le boxer, le carlin, le pékinois, le shi-tzu… sont prédisposées aux troubles cardiaques et respiratoires et donc particulièrement sensibles à l’intoxication par le chocolat. De même que les chiens de très petite taille, les animaux très jeunes ou très âgés, les insuffisants cardiaques ou hépatiques, les femelles gestantes.
Quels sont les symptômes de l’intoxication ?
Les symptômes apparaissent environ 4 à 8 heures après l’ingestion.
On note d’abord de la diarrhée et/ou des vomissements : la théobromine irrite les parois de l’estomac qui sécrète davantage de sucs gastriques. Le chien peut baver de façon excessive. Puis la théobromine passe dans le sang et atteint les autres systèmes (urinaire, nerveux et cardiaque).
Le chien a soif, il urine en grande quantité.
Il devient nerveux et s’agite beaucoup. Il halète, présente des spasmes musculaires, voire des convulsions pouvant aller jusqu’au coma.
Le cœur étant stimulé par la théobromine, le rythme cardiaque s’accélère, parfois jusqu’à l’arrêt cardiaque. La mort survient dans les 12 à 24 heures qui suivent l’ingestion.
En cas d’absorption d’une quantité massive de chocolat, la mort peut survenir brutalement par insuffisance cardiaque sans aucun autre symptôme : l’intoxication est aiguë. Inversement, l’intoxication peut être chronique par effet cumulatif : chez le chien qui absorbe de petites quantités de chocolat de façon répétée apparaissent une insuffisance cardiaque progressive et des ulcères dus à l’acidité des sucs gastriques.
Un traitement est-il possible ?
Lorsque les premiers symptômes apparaissent, il est en général trop tard pour pratiquer un lavage d’estomac. Le traitement mis en place vise essentiellement à soutenir le cœur, à diminuer l’intensité des convulsions et à favoriser l’élimination de la théobromine par les urines en mettant le chien sous perfusion. La théobromine étant difficilement éliminée de l’organisme, la durée de l’hospitalisation peut être longue.
En revanche, si vous voyez votre chien absorber le chocolat, il faut agir très rapidement et le conduire dans les deux heures qui suivent chez le vétérinaire qui pourra le faire vomir et/ou limiter l’absorption intestinale de la théobromine en administrant du charbon activé. Contrairement à une idée reçue, le lait n’est pas un antidote en cas d’intoxication ; au contraire, les graisses qu’il contient activeraient le passage de la théobromine dans l’organisme.
En médecine, la théobromine entre dans la composition de plusieurs médicaments, pour ses propriétés diurétiques, vasodilatatrices et cardiostimulantes.
Attention !
Certains engrais « bio » sont fabriqués à partir de cosses de cacao, qui contiennent de grandes quantités de théobromine (environ 2 à 4 mg de théobromine par gramme d’engrais). Ces engrais, qui contiennent aussi quelquefois de la poudre d’os, sont très appétents pour les chiens, qui peuvent en absorber de grandes quantités et mettre ainsi leur vie en danger.
Les cosses de cacao sont parfois aussi utilisées en couvre-sol décoratif ou paillis, à la place des écorces de pin (7 à 12 mg de théobromine par gramme de cosses broyées).
Et chez les chats ?
Les chats ne possèdent pas non plus les enzymes nécessaires à l’assimilation de la théobromine, le chocolat est donc toxique pour eux aussi. Mais comme ils sont moins voraces et moins attirés par le goût sucré que les chiens, les risques sont plus faibles : il est très rare qu’un chat mange une plaque de chocolat entière !