Magritte est un chat européen de 1 an. Il nous a été envoyé pour une échographie abdominale suite à une palpation anormale de ses anses digestives par son vétérinaire traitant.
Ce chat a séjourné à la SPA avant d’être adopté. Aucun antécédent médico-chirurgical n’est connu. Il est stérilisé et correctement vacciné et vermifugé. Depuis quelques temps, il mange moins, a eu des accès de fièvre. Il maigrit. Des ganglions ont été identifiés par son vétérinaire au niveau mandibulaire et poplité (au niveau des pattes ). Un bilan hématologique n’a pas révélé d’anomalie. Un dépistage des virus leucose et du sida félin a été réalisé et les résultats sont négatifs. Magritte a alors reçu de la cortisone et un antibiotique à longue action. Malgré une amélioration rapide des symptômes, une diarrhée est apparue quelques jours après la rémission, associée à de la fièvre. Son vétérinaire a alors identifié une masse au niveau abdominal.
L’examen échographique pratiqué à la clinique a révélé la présence :
- d’une hypertrophie du ganglion colique mesurant 4 par 3,5 cm. Son parenchyme est hypoéchogène de façon diffuse.
- d’un iléus focal visible en région iléocolique, en regard de ce ganglion. Cet iléus est caractérisé par une dilatation de la lumière intestinale, un épaississement de la paroi colique (3,5 mm) et un défaut de contractilité du segment intestinal.
- d’un épanchement en région rétropéritonéal, près de la vessie, en quantité minime.
Des ponctions du liquide d’épanchement, d’urine (photo 1) ainsi que du ganglion colique sont réalisés sous contrôle échographique.
Le liquide d’épanchement est de couleur jaune vif, et visqueux. Il s’agit d’un exsudat à l’analyse (protéines élevées, présence de granulocytes neutrophiles et de quelques macrophages). Un test de Rivalta est également positif et confirme l’exsudat (photo 2).
La cytoponction du ganglion évoque la présence d’une adénite pyogranulomateuse (photo 3).
L’analyse d’urine révèle une forte bilirubinurie.
L’ensemble de ces éléments biologiques, associés aux données épidémiologiques nous oriente vers un diagnostic quasi-certain de Péritonite Infecfieuse féline humide (ou PIF). Après discussion, aucun autre examen de confirmation de la maladie n’est entrepris.
A l’heure actuelle, aucun traitement efficace n’existe et la vie de ce chat est compromise. De la cortisone est administrée pour stimuler l’appétit.
La péritonite infectieuse féline (PIF) est la première cause infectieuse de mort chez les chats. La PIF se déclare lorsque l’organisme du chat réagit mal à une infection par le coronavirus félin (FCoV). La plupart des chats sont simplement atteints par l’infection, excrètent le FCoV pendant un ou deux mois, puis produisent une réaction immunitaire qui leur permet d’éliminer le virus et de vivre le reste de leur vie sans problèmes. Toutefois, pour des raisons que nous ne comprenons pas encore parfaitement, au lieu de se débarrasser de l’infection au FCoV, certains chats malchanceux contractent cette PIF. Les symptômes dépendent des vaisseaux sanguins atteints et des organes qu’ils irriguent. Lorsque la forme est aiguë la PIF présente en général une forme humide (abdominale, thoracique), alors que lors d’évolution chronique, elle peut prendre une forme dite sèche, avec la présence d’un fort taux d’anticorps anto-FCoV et le développement de granulomes dans différents organes (yeux, cerveau…).
C’est la confrontation des résultats de plusieurs examens biologiques associés à aux données épidémiologiques qui permettent d’évoquer la PIF car seule l’analyse histologique des organes malades fait office de gold standard pour confirmer cette maladie. Ainsi il faudra en général une combinaison de plusieurs examens tels qu’un test sérologique d’anticorps anti FCoV, un protidogramme (Alb/ glob < 0,4), une hématologie, un dosage de marqueur de l’inflammation (alpha 1 GPA) des cytologies d’organes et/ou l’analyse du liquide d’épanchement pour évoquer le diagnostic. Enfin récemment un test de dépistage du virus de la péritonite infectieuse féline (PIF) a été mis au point par RealPCR pour faire distinction entre le biotype FECV moins virulent ou non pathogène et le biotype FIPV, qui est virulent et pathogène, ce qui permet d’établir un diagnostic définitif de péritonite infectieuse féline (PIF) ou de l’exclure.
Dans la mesure où le virus FCoV est extrêmement contagieux, il n’est pas toujours nécessaire de tester tous les chats d’une maisonnée pour savoir si le virus est présent : si les chats vivent en groupe, il suffit de prendre un seul échantillon dans chaque groupe. Généralement, lorsque le FCoV est endémique, plus de 90 % des chats présentent des anticorps. Dans les programmes de contrôle, les chats sont testés tous les 2 à 3 mois et à mesure que leur titre d’anticorps diminue, on les replace dans le groupe négatif afin d’éviter une réinfection. Le FcoV peut rester infectieux 7 semaines dans un environnement sec ; après la mort d’un unique chat à PIF, un propriétaire devrait donc attendre trois mois avant de prendre un nouveau chat.