Toundra est une chatte européenne non stérilisée de 8 ans qui présente des vomissements chroniques depuis quelques mois. Un premier traitement symptomatique a permis une rémission des signes. Puis Toundra a récidivé il y a quelques jours. La chatte est abattue et présente une souillure de la vulve. Son vétérinaire a réalisé une échographie et suspecte une métrite. Une image anormale (aspect de kyste) a également été constatée en arrière du foie. Toundra nous est envoyée pour explorer cette image et confirmer la maladie utérine.
A l’échographie les cornes utérines sont visibles et présentent une lumière dilatée avec présence d’un contenu anéchogène (présence de liquide dans les cornes utérines).
L’examen du foie ne présente pas d’anomalie en particulier le long du cholédoque. Des structures circulaires kystiques avec paroi sont visualisées au sein du lobe droit et du corps du pancréas. Un des kystes mesure près de 3 cm de diamètre (photo 1). Une suspicion de pseudokyste ou d’abcès pancréatique est émise chez ce chat en plus de sa métrite.
Une cytoaspiration est réalisée sous légère sédation : 6 millilitres d’un transudat pur sont aspirés. Un dosage de la lipase spécifique est également effectué, et le résultat est supérieur aux valeurs usuelles (pancréatite).
En conclusion, Toundra présente une métrite associée à des pseudokystes pancréatiques, secondaire à l’existence d’une pancréatite d’évolution chronique.
Quelques jours après la ponction, l’état de Toundra s’est nettement amélioré. Elle a été opérée de sa métrite quelques semaines plus tard. Elle suit actuellement un régime diététique strict, reçoit des antiacides et de la cortisone en cas de crise de pancréatite.
Les pseudokystes pancréatiques s’installent secondairement à l’évolution d’une pancréatite par obstruction des canaux pancréatiques par inflammation. Ils correspondent à une collection stérile de sécrétions pancréatiques, qui est entourée d’une paroi fibreuse ou d’un tissu de granulation. À l’examen échographique, les pseudokystes pancréatiques évoquent des structures circulaires kystiques, à contours plus ou moins bien définis, souvent dépourvues de paroi, renfermant un contenu hypoéchogène voire anéchogène et parfois quelques débris hyperéchogènes en suspension. On peut observer d’autres modifications pancréatiques témoignant d’une pancréatite concomitante. Elles se caractérisent le plus souvent par un pancréas épaissi (donnant parfois un effet de masse), hypoéchogène, entouré d’une graisse mésentérique hyperéchogène (photo 2).
Un épanchement peut être présent, signant une péritonite localisée. L’hypoéchogénicité du pancréas traduit la nécrose de l’organe et l’hyperéchogénicité de la graisse mésentérique témoigne de la stéatite péripancréatique liée à la libération des enzymes localement. Ce contraste accentue la visualisation du pancréas lors d’atteinte aiguë.
Lors de pancréatite, le duodénum peut apparaître plus épais (son épaisseur dépasse alors 3 mm), festonné, avec une atténuation des couches échographiques ou augmentation de la taille de la musculeuse. La motilité duodénale est souvent diminuée et la lumière plus dilatée. Cet iléus peut concerner également le reste de l’appareil digestif (estomac de « rétention », l’intestin grêle en général).
Des modifications biliaires peuvent être observées : un épaississement de la paroi de la vésicule biliaire ou du conduit cholédoque qui, dans le contexte de pancréatite, sont en faveur d’une cholécystite et d’une cholangite respectivement, un épaississement de la bile qui se transforme en boue biliaire. Une cholestase extrahépatique est visible lors d’obstruction des voies biliaires : le conduit cholédoque dépasse alors 5 mm de diamètre, la vésicule biliaire peut être distendue. Chez le chat, il est fréquent de rencontrer une atteinte simultanée du pancréas, du foie et de l’intestin grêle (appelée « triade »).
Chez le chat, l’observation d’un pancréas normal à l’échographie n’exclut pas une pancréatite. La sensibilité de l’échographie est d’environ 68% chez le chien, alors qu’elle est de 11 à 35% chez le chat selon certaines études. Cette différence s’explique par une observation plus aisée du pancréas chez le chien, en raison de sa taille plus importante et par le fait que la composante aiguë est plus fréquente.
Plusieurs études ont montré l’intérêt diagnostique et thérapeutique des cytoaspirations échoguidées des pseudo-kystes pancréatiques. Elles ont également mis en évidence l’absence de complications en pratiquant cette technique.
En conclusion, cela peut donc être un vrai défi de dépister une pancréatite chez un chat, surtout d’évolution chronique. Heureusement des tests sanguins récents et très sensibles apportent des informations complémentaires à l’échographie. Dans notre cas, la découverte de ces kystes nous a bien aidés.
Pour en savoir plus :
VanEnkevort BA & coll. Pancreatic pseudocysts in 4 dogs and 2 cats : ultrasonographic and clinicopathologic findings. JVIM 1999, 13 : 309- 313.
Kolb H, Testault I. Echographie des affections pancréatiques chez le chat et le chien. Point Vét. 2013 , 333 : 19-23